dimanche 15 avril 2012

Ni la loi, ni la jurisprudence marocaines ne définissent avec exactitude l’erreur médicale

Maintenant que cette association de défense des victimes des erreurs médicales a vu le jour, sur quelle base va-t-elle s’appuyer pour mener son travail ? M. Himdi admet qu’il y a un vide juridique en la matière, et qu’il faut à son avis combler au plus vite. 
Certes, au-delà de sa responsabilité devant ses pairs, examinée par l’ordre national des médecins, l’erreur médicale, selon la loi marocaine, engage aussi la responsabilité civile (compensation pécuniaire) et la responsabilité pénale (appréhendée selon le préjudice causé à la société) du médecin. Le code pénal assure ainsi la protection des personnes qui pourraient être exposées à la malveillance, à la négligence, à l'imprudence ou à l'imprévoyance du médecin. 
Mais ni la loi ni la jurisprudence ne définissent avec exactitude l’erreur médicale. S’il y a plainte de négligence contre un médecin, entraînant la mort ou tout autre préjudice, le parquet, explique le Dr Hicham Benyaich, responsable au service de médecine légale à l’hôpital Ibn Rochd de Casablanca, «ouvre une enquête et demande une expertise comme le dit la loi auprès de médecins du secteur privé. Ce qui est une aberration sur ce point : le secteur public recèle des compétences qui peuvent le faire. Notre service de médecine légale ne s’occupe que des autopsies quand on les lui demande et là s’arrête son travail». Le nombre d’autopsies demandées annuellement ? «Entre 10 et 15 chaque année», répond notre interlocuteur. En France, on estime à 10 000 le nombre de décès par an dus aux erreurs médicales. 
Le nombre de 10 à 15 autopsies au Maroc correspond-il au nombre annuel d’erreurs médicales ou supposées l’être ? Personne ne peut le confirmer. L’association qui vient de naître ne le sait pas non plus, mais elle vise la création d’un centre d’écoute et d’un observatoire national qui pourraient l’aider dans ce sens. «Et dans ce domaine comme dans d’autres, nous voudrons nous inspirer des expériences d’autres pays comme la France qui ont une longueur d’avance sur nous», indique M. Himdi. L’expérience française est effectivement une référence à plus d’un titre dans ce domaine, sauf que les Français eux-mêmes, malgré l’existence de «l’Association d’aide aux victimes d’erreurs médicales» depuis plus de 20 ans (elle a été créée en 1990), n’ont obtenu la reconnaissance par la jurisprudence française de ce qu’on appelle «la perte de chance de survie» qu’en 2007. Et, depuis, les avocats ayant régulièrement plaidé cette notion ont obtenu gain de cause dans de nombreux affaires. Nos avocats et la nouvelle association auront-ils un jour un tel texte sur lequel ils pourraient s’appuyer devant les tribunaux marocains ?

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